Comme bon nombre de femmes, Inès Oudumaya a des règles douloureuses. Habituée des bouillottes pour se sentir mieux, elle en avait assez de devoir trouver et garder la bonne position pour la maintenir en place, la tenir en permanence quand elle se levait ou bougeait. Voire même, devoir se promener avec sa bouilloire pour pouvoir la réalimenter en eau chaude.
“Je me suis dit : je vais me coudre une bouillotte dans une culotte, comme ça je n’aurai pas à y toucher.” Dans un premier temps, elle chauffe des graines de lin au micro-ondes, qu’elle insère dans une petite poche qu’elle se confectionne. Seulement, elle remarque qu’il faut une épaisseur assez conséquente de graines de lin pour que la chaleur dure. “C’est là que j’ai pensé aux chaufferettes”, se rappelle-t-elle. C’est ainsi que l’idée des Culottées de Saturne est née. “Je me suis dit, si ça m’a aidée, je suis sûre que ça peut aider d’autres personnes.”
Partie de rien
La particularité de ses culottes, classiques ou menstruelles, c’est d’avoir une petite poche sur le devant, positionnée là où on ressent les douleurs, dans laquelle on va pouvoir insérer une petite chaufferette d’à peine un centimètre d’épaisseur.
Au moment des douleurs, il suffit de clipser la pastille en métal qui est à l’intérieur, celle-ci libère ensuite de la chaleur. Pour la réutiliser, il suffit de la faire bouillir pendant 5 minutes. Le concept est donc très simple d’utilisation, notamment au travail, car il n’y a pas besoin d’avoir une bouilloire à proximité et l’effet est immédiat.
Mais au moment de se lancer Inès Oudumaya n’y connaît pas grand-chose en la matière. Ingénieure en aéronautique de formation, bien que capable de réaliser des patrons et de coudre, elle part alors de rien pour créer sa marque, et surtout “avec zéro euro en poche. Je n’avais pas encore signé mon CDI. J’ai alors pensé au financement participatif. Ce qui m’a permis de lancer ma première production sans avoir de dettes”.
Le parcours du combattant commence. Il faut déterminer quel type de tissu : “Je souhaitais travailler avec du coton bio.” Il faut alors trouver les fournisseurs, qu’elle déniche finalement au Portugal, puis designer le produit…” Ça m’a pris beaucoup de temps parce que j’étais toute seule et que je travaille à côté”. Le premier prototype est réalisé à partir d’un patron qu’elle dessine et le modèle final est déterminé.
Désacraliser le sujet
Il faut ensuite communiquer et là, elle réalise que le sujet n’est pas aisé. “Il y a beaucoup de business sexy qui se lancent : des sacs bio, des chaussures upcyclées… Mais là, c’était moins glamour. On parle de plus en plus des règles, avec les culottes menstruelles qui se sont vraiment développées, mais pas des règles douloureuses. Au début, quand j’abordais le sujet, les gens baissaient les yeux, ils ne posaient pas de questions. Même moi, j’avais du mal à en parler auprès de mes amis, sur les réseaux sociaux. Maintenant que c’est lancé, que j’ai bénéficié à apporter une solution, les gens sont encourageants. Comme ça crée un certain engouement, la parole se libère, même de la part des hommes. Ça conduit aussi certaines femmes à se confier sur ce qu’elles vivent. Ça permet vraiment de désacraliser ce sujet”.
Et puis, ça change la vie ! Avant de se lancer, Inès Oudumaya a réalisé une enquête : 2000 réponses lui sont revenues. Dans 70% des cas, les femmes expliquent avoir des règles douloureuses et utiliser des bouillottes. “Je suis hyper contente de voir que ça peut aider d’autres femmes, d’autres personnes menstruées. Le plus gratifiant dans tout ça, c’est de recevoir des messages positifs presque quotidiennement.”
Un coup de foudre avec Saturne
Désacraliser le sujet des règles douloureuses, offrir plus de confort aux femmes, participer à développer cette image de femme émancipée, c’est un peu aussi ce que suggère le logo des Culottées de Saturne. Des femmes libres, portant juste une culotte, sur les anneaux de la célèbre planète, image qu’Inès Oudumaya voudrait voir décliner à l’avenir sur ses produits.
“La première fois que j’ai observé le ciel, c’était pendant la Nuit des étoiles, cet événement lors duquel des amateurs prêtent leur télescope. Ce soir-là, j’ai observé pour la première fois Saturne. J’ai eu un coup de foudre. Un mois plus tard, je me la suis fait tatouer sur le bras.” Un coup de cœur qui a été à l’origine du nom de la marque. “Et puis je travaille dans le spatial, c’est mon métier, ce que j’aime”.
Les projets sont nombreux pour Inès : aller plus loin, avec des produits pourvus de chaufferettes dans le dos, pour soulager les douleurs de règles au niveau des lombaires. Et pourquoi pas aussi des boxers ? Les Culottées de Saturne commencent juste à se mettre en orbite.