De quelle façon le saumon peut permettre de se réinventer pour relever les défis de la vie ? C’est ce que s’attachent à expliquer Camille Syren, psychologue, et Alice Hachet, clown contemporain, avec humour et profondeur dans « La Gymnastique du saumon ou l’art de se réinventer ». Depuis deux ans, elles jouent ce spectacle est un peu partout en France, et déjà vu par plus d’un millier de personnes, dans lequel elles offrent un regard croisé et un éclairage sur la capacité de chacun à se réinventer.
Les deux femmes vont le présenter pour la première fois à Paris, le 18 juin, au théâtre du Petit Saint-Martin, dans le 10ᵉ arrondissement.
AirZen Radio. Comment est né ce spectacle ?
Camille Syren. Chez moi, c’est parti d’une envie de différencier quelque chose qu’on confond beaucoup dans l’océan de développement personnel : « bien-être » et « être bien ». On confond les deux. « Bien-être », ce n’est pas “être bien”. C’est d’abord apprendre à devenir un peu un spécialiste du décodage de ces états pour qu’ils nous délivrent toutes les informations pour nous orienter, décider et agir, etc. Donc, évidemment, la gymnastique du saumon, est une manière d’assouplir, de muscler son intelligence émotionnelle. Ça consiste finalement à nous équiper avec des fondamentaux pour bien comprendre la grande mécanique et pouvoir devenir des spécialistes de tout ce que l’intelligence artificielle ne pourra jamais faire à notre place.
Alice Hachet. Le sous-titre de notre livre, c’est l’art de se réinventer. Je pense que ça rejoint complètement ce dit Camille sur savoir-faire avec nos états émotionnels. Pour ça, le clown contemporain est un maître en la matière. On travaille vraiment sur comment on fait pour capter nos signaux, nos émotions, nos états émotionnels. Et, après, comment on va développer le jeu à partir de ça. Puis ça va venir toucher l’art de se réinventer. C’est-à-dire se transformer à l’intérieur de soi. On ne change en rien, finalement, et en changeant tout à la fois. Ce qui est un peu paradoxal. Moi, j’aime bien dire “c’est se transformer de soi en soi-même”.
Selon vous, en quoi ce spectacle est bénéfique ?
Alice Hachet. D’un point de vue du clown contemporain. Je pense que le clown contemporain aujourd’hui a toute sa place comme il l’avait autrefois. Parce qu’il vient des fous du roi. De cet archétype du personnage libre, qui pouvait être dans la cour du roi et pouvait dire tout haut ce qu’on ne pouvait pas forcément dire. Souvent, le clown permet aussi de revenir sur quelque chose de très incarné, de vrai, de très juste, authentique et qui rassemble. Ça fait qu’on est entier avec son corps, son esprit, sa pensée et ses émotions. Je pense que dans l’époque dans laquelle on vit, cela est beaucoup théorisé. Mais ce n’est pas toujours très efficient ou efficace dans ce sens-là. Je pense que la Gymnastique du saumon nous ramène à quelque chose d’efficace dans le bon sens du terme.
Camille Syren. Oui, c’est tout à fait ça. C’est-à-dire qu’en matière d’émotions, ce n’est pas toujours ceux qui en parlent le plus qui les éprouvent le mieux. En ce sens, la pratique du clown est très sensée. Si on veut aussi prendre encore un peu plus de hauteur sur les enjeux sociétaux, je trouve qu’aujourd’hui on parle de transition écologique, économique, des organisations, des modes d’organisation. Mais comme le disait très bien Pierre Rabhi, il n’y aura pas de changement de société sans changement des humains. Et au fond, il n’y aura pas de changement des humains sans changement de chacun.
Donc, pour accompagner toutes ces transitions très macro, il va bien falloir qu’on soit bien équipé au niveau micro, c’est-à-dire au plus intime de nous. En la matière, le saumon détecte des tas de signaux. Et chez nous, humains, tout est là. On est doté du tableau de bord le plus high-tech que la nature n’ait jamais inventé. Et bizarrement, on va chercher toujours à l’extérieur ce qu’on a déjà à l’intérieur de soi. Il faut donc réapprendre à se fréquenter, à pratiquer l’intériorité en quelque sorte. Cest un enjeu pour l’humanité
Qu’est-ce que ça représente pour vous de jouer à Paris, le 18 juin ?
Alice Hachet. Pour moi, c’est une immense fierté, évidemment. C’est aussi assez inattendu parce que c’est une aventure incroyable qui a commencé avec un spectacle. On n’avait pas du tout fait de business plan ou de plans sur la comète. Ça s’est fait un peu comme ça, au fil de l’eau. Puis, la vie nous a guidés jusqu’à cette date à Paris. C’est encore plus incroyable parce que cette adresse était l’ancienne école du mime Marceau. Pour moi, le mime Marceau est un grand bonhomme qui a marqué le théâtre du chapeau. Et c’est par là que j’ai commencé le mime classique, la pantomime.
Camille Syren. Tout ce chemin parcouru. Ce dont je suis fière, aussi, c’est finalement la façon dont ça a pris forme. En faisant nous-même de la Gymnastique du saumon. Ça a commencé par suivre le fil d’un indice de plaisir. On était au fond, on était dans la flaque. Une opportunité s’est présentée. On a créé en effet ce spectacle dont on a trouvé le nom un peu par hasard. Et, en fait, à sa première représentation à Bordeaux, beaucoup nous ont dit : « C’est génial, il faut que vous continuiez ». C’est ce qu’on a fait. Ça fait maintenant deux ans. Comme une gymnastique, ce spectacle s’est peaufiné, amélioré, précisé. Et voilà, aujourd’hui c’est génial parce qu’on se retrouve à Paris.