Pénurie de carburant, grève dans les transports, raréfaction des ressources… La rentrée 2022 a été mouvementée et a pu jouer sur notre patience, notre moral et nos nerfs.
Comprendre voire militer pour une cause n’empêche pas de se sentir pris en étau ou impuissant face à une situation. Et donc ressentir de la frustration voire de la colère. Et la psychologie urbaine pourrait nous aider à y voir plus clair.
Pourquoi la pénurie de carburant nous pompe-t-elle ?
Barbara Attia est psychologue urbaine. Elle travaille actuellement pour le premier Observatoire santé et qualité de vie urbaine.
« On peut remonter aux travaux du psychologue Maslow pour comprendre. Il a notamment hiérarchisé nos besoins fondamentaux, au rang desquels arrivent en tête les besoins physiologiques », explique-t-elle. Parmi ces besoins nécessaires à l’épanouissement, ceux de se nourrir, de se loger ou encore de se mouvoir.
« On a derrière tout ça une certaine liberté de mouvement. Si on touche à cette liberté urbaine de se mouvoir, on touche aux besoins physiologiques des gens. Et alors, on touche à leur santé mentale », ajoute la psychologue.
Comment évacuer le stress ?
Selon Barbara Attia, dans ces situations qui nous privent de notre liberté de nous mouvoir, c’est principalement du stress qui est généré : « Le stress, qu’est-ce que c’est ? C’est quand je ressens un déséquilibre entre mes besoins et mes ressources. Dès lors, on peut s’adapter pendant un temps court. Mais si le stress devient chronique ou intense, on déclenche des situations extrêmes de mal-être. »
Selon la spécialiste, ce sont ces situations de stress exacerbé qui peuvent entraîner des réactions parfois véhémentes, voire violentes. « C’est physiologique. Le corps a besoin d’évacuer », dit-elle. Sans pour autant que cela ait un lien avec l’appréciation de la cause en elle-même ou non.
On peut, par exemple, être d’accord avec les revendications de grévistes ou militer pour la planète tout en souffrant, au plan psychique, des privations que cela engendre. Dans le cas de la pénurie de carburant, « on ne se contrôle plus, c’est le corps qui réagit au stress », ajoute-t-elle.
Que faire pour ne pas subir ce stress aigu ?
- À l’échelle individuelle : « On peut essayer de renforcer le lien social, l’entraide entre voisins parce que la solidarité a un effet bénéfique sur le stress. Cela peut passer par du covoiturage, la garde d’enfants, le télétravail ou autres. On peut aussi mieux se renseigner sur l’offre de transports en commun. Cela va jouer sur notre capacité de trouver des alternatives. Maintenant, il y a des situations de dépendance qui sont difficiles à régler quand on dépend uniquement dudit transport ou, en l’occurrence, de l’essence. Il n’y a pas toujours une solution à tout », reconnaît la psychologue.
- À l’échelle de la vie locale : « On a vu par exemple le TER à 1 € en région Occitanie pendant la grève dans les raffineries. Cela a très bien fonctionné. Il faut justement profiter de ces situations pour se poser la question suivante : l’offre de transport en commun est-elle suffisante et adaptée pour y faire face », suggère Barbara Attia.
- À l’échelle de la vie d’un pays : l’action peut être pensée à un plan plus large, lors d’élections par exemple. Cela peut aussi dépendre de la forme de communication employée par les pouvoirs publics : « Il faut mieux communiquer sur l’état du conflit, par exemple. Pendant les confinements, nous avons beaucoup souffert d’un certain manque de transparence et d’explications… Tirons-en les bonnes leçons », ajoute la psychologue.
Quel est l’apport de la psychologie urbaine ?
Selon l’Observatoire Santé et Qualité de vie urbaine, les Français attribuent la note de 74/100 à leur perception de liberté. « La liberté est l’une des composantes principales de la qualité de vie urbaine, détaille la psychologue. Cela ne veut pas dire que les personnes vivant à la campagne ne la ressentent pas. Cela englobe aussi les populations rurales dès lors qu’elles ont un lien avec la ville, par le travail, par exemple. »
Tout l’intérêt de cette spécialité est d’intégrer à la façon de penser « la ville » la dimension psychologie et bien-être. « Il est impératif de trouver des solutions qui vont venir augmenter la qualité de vie urbaine et apaiser les populations », conclut Barbara Attia.