« Aujourd’hui, et grâce à vous, je me sens moins seule dans ma solitude », confie, émue, l’une des participantes aux « apéros de la mort ». Elle figure parmi la quinzaine de personnes inscrites pour la session du mois de février 2022 qui se déroule dans un bar du 10e arrondissement de Paris.
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À l’initiative du concept, Sarah Dumont, ancienne journaliste et fondatrice de Happy End, la plateforme de soutien spécialisée dans les obsèques et le deuil. Tous les mois, accompagnée de la thérapeute et coach en accompagnement du deuil Sophie Poupard Bonnet, elle accueille toutes celles et ceux qui traversent un deuil, accompagnent un proche en fin de vie ou se questionnent simplement sur leur propre fin.
Cadre chaleureux, propice à la discussion
Au départ, comme pour un apéritif classique, des planches de tapas sont commandées. « J’ai entendu parler des apéros à la télévision, et j’avais envie de venir, j’en avais besoin », confie Isabelle après avoir commandé une bière.
Comme les autres, elle assiste, attentive, aux règles énoncées par Sophie : « Il s’agit de parler de cœur à cœur, de respecter la confidentialité, mais aussi les croyances des uns et des autres », explique-t-elle. « Le but ici, dans ce cadre chaleureux, c’est de libérer la parole sur la mort et de l’accepter pleinement », ajoute Sarah Dumont.
Un moment d’humanité
Le ton est donné, le cadre est intimiste, propice à la confidence et au laisser-aller. C’est Hélène, verre de chardonnay à la main, qui commence : « J’ai perdu ma fille. Elle avait 37 ans, cela a été très violent. Aujourd'hui, je fais semblant que tout va bien, mais c'est difficile », raconte-t-elle. « J’ai perdu mon papa, l’année dernière. Il devait réparer ma cuisine. Aujourd’hui, c’est moi qui monte les meubles… Mais c’est difficile, car lorsque la cuisine sera terminée, cela voudra dire qu’il est vraiment parti », continue Isabelle. « J’ai décidé de ne pas me laisser abattre et il serait fier de moi », ajoute Sabine qui a récemment perdu son conjoint, « l’amour de sa vie ».
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Les témoignages s’enchaînent, à cœur ouvert, les participants s’écoutent, se rassurent, rebondissent, laissent échapper quelques sanglots, quelques rires aussi et des remarques encourageantes.
L’écoute est attentive, sensible et bienveillante. C’est un réel moment d’humanité où les langues se délient : « Je suis dans une famille où je n’ai pas eu le droit de pleurer le décès de mon frère… Aujourd’hui, c’est presque comme s’il n’avait jamais existé », explique une participante. « Le fait de parler de lui ce soir, c’est une façon de continuer à le faire vivre », lui répond une autre.
Des apéros un peu partout en France
Pas de tabous. Tous les thèmes sont abordés à bâtons rompus : le deuil, la fin de vie, l’au-delà même. La soirée s’étire, les participants ne veulent plus se quitter. Celles et ceux qui étaient les plus réservés donnent des conseils aux autres pour mieux gérer le quotidien, avec la douleur.
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« Je repars ce soir avec la sensation d’avoir été écouté et entendu. Cela m’a rassuré de voir que d’autres vivaient des douleurs similaires à la mienne, même si les deuils sont incomparables, un vrai moment d’humanité », confie Malek, ému.
Aujourd’hui, les « apéros de la mort » existent à Paris et Cambrai. Ces cessions sont gratuites (seule sa conso est à régler) et ouvertes à toutes et tous. « Notre objectif est de former des ambassadrices dans d’autres villes de France pour exporter le concept », annonce Sarah Dumont selon laquelle la libération de la parole autour de la mort est indispensable et rassurante, parmi lesquelles Lyon ou Toulouse.