Comment définir un légume ? À cette question, Éric Birlouez, ingénieur agronome et sociologue de l’agriculture et de l’alimentation, répond simplement : « Il n’y a pas de réelle définition du mot légume. Par exemple, si vous demandez à un cuisinier, un botaniste, un agronome ou à une personne dans la rue, ils n’auront pas la même définition. D’ailleurs, la représentation du légume a changé avec le temps. Au départ, il désignait les légumes secs. Et pour parler des salades, des radis, des carottes, on parlait de racines ou d’herbes. »
Aussi, Éric Birlouez soulève le fait que les légumes que l’on retrouve aujourd’hui sur les étals ne sont pas majoritairement originaires de France. Loin de là. « J’aime à dire que si on se contentait des légumes qui poussent à l’état spontané en France ou en Europe, on n'aurait pas grand-chose dans notre assiette, juste des betteraves, des blettes des choux, des carottes sauvages ou encore des panais. La plupart des légumes est arrivée avec le brassage de la population. Par exemple, le concombre vient du nord de l'Inde. Les aubergines sont probablement nées en Afrique orientale. Ou encore, l’ail et l'oignon viennent d’Asie Centrale. Sans oublier que la redécouverte du continent américain par Christophe Colomb va amener en Europe des pommes de terre, des tomates et des poivrons, entre autres. »
À savoir, l’image du légume a évolué au fil des années, souligne le sociologue : « Si on prend l'exemple d'il y a 2000 ans, au moment de la conquête de la Gaulle par les Romains, ces derniers ont ramené avec eux le goût des légumes et de leur culture. En revanche, pendant la période du Moyen Âge, les légumes sont méprisés par les nobles, les riches, les élites sociales parce que ceux qui mangent des légumes ce sont des pauvres qui les cultivent pour se nourrir. Et derrière, il y aussi la symbolique du fait que ça pousse dans la terre et c'est un élément de la création qui est dévalorisé à cette époque. Contrairement aux grands oiseaux comme les cygnes, les hérons, ceux qui volent, qui sont donc proches des Dieux, des saints, des Anges. En somme, le légume est une nourriture de paysan. »
Depuis qu'il est consommé, le légume aura connu amour et désaffection jusqu'à nos jours. D'ailleurs, celui qui est aussi auteur du livre "Petits et grandes histoires des légumes", remarque le retour des légumes anciens et oubliés, popularisés par les chefs.