Depuis quelque temps, les consommateurs font face l’émergence d’un terme : la shrinkflation. Cet anglicisme est la contraction de deux mots “shrink”, qui signifie rétrécir, et inflation, que l’on pourrait traduire par “réducflation”. L’ONG de défense des consommateurs Foodwatch a lancé une pétition début septembre, qui a recueilli près de 50 000 signatures, pour exiger des industriels et des distributeurs un étiquetage sur les produits concernés par cette pratique marketing. Camille Dorioz, le responsable de campagne de l’association, décortique ce phénomène.
AirZen Radio. En quoi la shrinkflation est problématique ?
Camille Dorioz. Parce que, dans les rayons, les consommateurs voient réduire leurs produits en taille, mais les prix vont augmenter au kilo. C’est quasiment imperceptible puisque le packaging ne change presque pas
Est-ce une pratique légale ?
C’est légal, ils [les industriels et les distributeurs, NDLR] n’ont pas besoin d’avertir les consommateurs. En revanche, ils sont obligés d’afficher le grammage du produit. Le problème est que, d’une semaine à l’autre, s’il y a eu un changement au niveau de la quantité et du prix, vous n’allez pas vous en rendre compte.
Est-elle pratiquée depuis longtemps ?
Malheureusement, oui. Elle est aussi vieille que le marketing et les supermarchés. Nous, à Foodwatch, on a décidé d’alerter à la suite de plusieurs remontées de consommateurs en hiver dernier. On a alors lancé une campagne en septembre 2022 comme l’inflation prenait beaucoup de place et qu’il y avait un danger que la shrinkflation masque l’inflation aux consommateurs. Ainsi, leur éviter de voir les prix augmenter d’un seul coup
Si cela fait plus d’un an que vous alertez sur cette pratique, pourquoi en parle-t-on davantage ces derniers temps ?
Parce que l’inflation en septembre n’a pas ralenti. Et le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a réagi face à notre interpellation et de celle des près de 50 000 signataires de notre pétition. Il a dit qu’il allait mettre en place un étiquetage pour les produits concernés par la shrinkflation (1). Là, les distributeurs ont commencé à nous dire qu’ils allaient le faire dans les rayons. Pourtant, c’est ceux-là même qu’on interpelle depuis des mois (2).
Et est-ce que la shrinkflation est pratiquée uniquement dans les grandes surfaces ?
Nous l’avons étudiée uniquement en grandes surfaces. Mais vous avez peut-être vu que certains restaurants et fast food sont pointés du doigt sur rapport à ce sujet-là. Ça prouve bien que ça peut être partout. L’objectif de la shrinkflation est de réussir à ne pas trop modifier le prix d’affichage et de masquer cette inflation que l’on subit de plein fouet. Cela ne permet pas au consommateur de bien gérer son portefeuille, c’est ce que l’on dénonce chez Foodwatch.
(1) Le ministre a annoncé une proposition de loi, pour début octobre, qui obligerait les industriels à faire figurer de manière très visible la réduction de contenu quand ils gardent le même packaging.
(2) Depuis le 11 septembre, les enseignes Carrefour indique si la quantité d’un produit a baissé et si son prix a augmenté.