C’est tout un écosystème qu’Ingrid Walbrou a créé depuis Saint-Romain-le-Noble dans le Lot-et-Garonne (47). La marque de la trentenaire, La Belle Absorbante, propose des serviettes hygiéniques réutilisables pendant quatre ans. Cette protection hygiénique a reçu la médaille de bronze au concours Lépine et le coup de cœur du jury au prix économique Néo-aquitain.
C’est son envie de coudre “utile” qui l’a poussée à se lancer dans l’entrepreneuriat en 2018. « Je voulais rendre accessibles les protections hygiéniques, parce que je trouvais que ça coûtait trop cher. Et puis quand j’ai en plus découvert qu’il n’y avait aucune norme sur ce type de protection, je me suis dit qu’il fallait que je crée La Belle Absorbante », explique Ingrid Walgrou. En effet, la cheffe d’entreprise déplore le fait qu’il n’y ait pas de normes, en Europe, sur toutes les composantes des protections menstruelles.
“Une serviette engagée envers les femmes”
Par ailleurs, avant de commercialiser son produit, Ingrid l’a testé sur 1 200 femmes. Elle a prêté attention au confort, mais aussi à la qualité des matériaux. « C’était important pour moi qu’ils soient durables et surtout sains pour le corps. C’est pour cela que ma partie absorbante est constituée de cellulose de bouleau. Il s’agit d’une marque déposée, le Tencel. Cette éponge tissée en France a la particularité de sécher très vite et d’absorber beaucoup puisqu’on est quasiment à 500 % d’absorption. Mais surtout, elle évite le développement des bactéries qui détestent la chaleur et l’humidité. »
Tous les produits de protection menstruelle de la marque sont confectionnés au sein de l’Atelier WD Protection. Ce dernier a été créé par Ingrid et est spécialisé dans les éponges et la fabrication de lingerie telle que les culottes. L’entrepreneure s’occupe elle-même de la confection, en lien avec des couturières qui viennent régulièrement en mission. « À partir de janvier 2024, on aimerait aussi aménager des ateliers dans une maison d’arrêt pour pouvoir former au sein des prisons », précise Ingrid Walbrou.
L’entrepreneure souhaite en effet donner une dimension plus sociale aux protections hygiéniques. « Si je vais loin dans mon raisonnement, hormis le textile, on peut considérer qu’il y a la mode, l’art, le luxe et des protections de première nécessité. Les protections périodiques doivent être pensées pour le bien commun avant tout et non pas comme un objet de luxe. »
L’accessibilité des protections périodiques
En effet, une étude d’Opinion Way réalisée pour l’association Règles Élémentaires révèle qu’en 2022, 4 millions de femmes ont été victimes de précarité menstruelle en France. Ingrid Walbrou s’est retrouvée dans cette situation quand elle était étudiante.
Pour celles qui sont manuelles, Ingrid Walbrou vend aussi des kits à coudre, pour confectionner sa propre serviette hygiénique. Sinon, les protections de La Belle Absorbante sont vendues entre 10 et 18 euros, et la culotte menstruelle entre 20-25 euros. Les inserts pour augmenter l’absorption du flux sont à 2 euros. Des tarifs encore élevés pour la créatrice de La Belle Absorbante, mais qu’elle justifie en raison de la qualité des matériaux.
En outre, pour développer sa démarche d’accessibilité des protections hygiéniques, la lot-et-garonnaise a fondé le Fablab OSE (Objectif Savoir-faire Ensemble) dont elle est présidente d’honneur. « On a lancé des programmes dont “Ose changer les règles”. L’idée est de pouvoir distribuer des serviettes ou donner des cours de couture dans les quartiers ou pour les personnes qui en ont besoin. En Haute-Garonne, 700 jeunes filles de moins de 20 ans, il y a peu de temps, souffraient d’absentéisme. Et ça me rendait folle qu’il n’ait pas d’égalité. » L’ambition d’Ingrid Walbrou est de bâtir collectivement des actions permettant d’atteindre un territoire zéro précarité menstruelle.
Rien ne se perd
En ce qui concerne l’aspect recyclable de la serviette hygiénique, Ingrid Walbrou a pensé à un système de consigne. Elle a aussi utilisé des chutes de textile lors de la fabrication des produits pour les transformer en fournitures scolaires. Celles-ci ont été distribuées aux enfants accueillis par les Restos du cœur.
Par la suite, elle souhaite également créer des objets solides qui puissent être vendus à des industriels. Ces derniers participeraient ainsi à son projet dans le cadre de leur politique RSE, et financeraient les protections périodiques.