45% des jeunes Européens estiment que le dérèglement climatique impacte leur quotidien et leur vision de l’avenir. C’est ce qui ressort d’une récente étude publiée dans la très sérieuse revue “The Lancet”.
Pour tenter de comprendre les symptômes de cette éco-anxiété et donner aux jeunes des clés pour agir, la Fondation Jean Jaurès a décidé d’aller plus loin.
L’éco-anxiété, qu’est-ce que c’est ?
La Fondation Jean-Jaurès et le Forum français de la jeunesse publient de ce fait une vaste enquête sur l’éco-anxiété chez les jeunes Français de 18 à 30 ans. Une trentaine de personnes, de tous milieux socioprofessionnels, ont été interrogées.
L’étude a pour ambition de mieux saisir l’état d’esprit de ces jeunes éco-anxieux et la manière dont ils perçoivent l’aspect personnel, intime, collectif et politique de l’imminence du réchauffement climatique et de ses conséquences.
“L’éco-anxiété peut être de deux natures. Elle peut être prospective, c’est-à-dire une angoisse aiguë des conséquences du dérèglement climatique. C’est ce que peuvent expérimenter les jeunes Européens, par exemple. Elle peut aussi être post-traumatique, c’est-à-dire consécutive à un événement climatique grave”, explique Théo Verdier, l’un des trois rapporteurs de l’étude.
La colère, premier symptôme de l’éco-anxiété
« Nous avons été surpris de constater que c’est le sentiment de colère qui ressort en priorité chez ces jeunes », explique l’auteur de l’ouvrage “Des Européens éco-anxieux ? Le climat à l’épreuve du quotidien” (éditions de l’Aube).
Cette colère se manifeste contre les pouvoirs publics, les industries et entreprises. « Il y a une forme de dichotomie entre l’urgence climatique et l’inaction ou l’action beaucoup trop lente de ces instances aux yeux des jeunes », ajoute Théo.
« Je suis excédée d’entendre les gouvernements faire la leçon aux particuliers et remettre la responsabilité sur leurs épaules, là où eux devraient montrer l’exemple », confie par exemple Fanny. Cette étudiante de 22 ans estime que l’effort doit être collectif mais avant tout impulsé par les plus gros acteurs de la pollution.
Autre point clé de l’étude de la Fondation Jean Jaurès : le dérèglement climatique impacte le désir de parentalité. « Les jeunes de notre panel nous ont confié avoir des craintes pour l’avenir de la prochaine génération. Ils se posent souvent la question de savoir s’ils ou elles pourraient élever un enfant dans ce monde-là », explique le co-rapporteur. Une remise en question qui a néanmoins des nuances : « Certains voient aussi le fait d’avoir un ou des enfants comme un espoir, comme des militants de plus pour la cause du climat », ajoute Théo Verdier.
Eco-anxiété : comment « faire sa part » ?
Mais alors, que faire pour que cette éco-anxiété se mue en action ? « Pour ma part, j’en parle beaucoup autour de moi et essaye de contrôler ma consommation, notamment sur le textile », explique Fanny. « Moi, je fais vraiment attention à ma consommation de plastique et je sensibilise mes proches, j’agis à mon échelle », complète François, âgé de 25 ans.
Cette capacité à transformer son anxiété ou sa colère en action est très significatif chez les jeunes éco-anxieux : « L’éco-anxiété est rarement inhibitrice. La prise de conscience quant à la situation climatique peut entraîner une période de stress aiguë mais on y reste rarement. Les jeunes que nous avons interrogés transforment cela, sans en avoir conscience, en action », explique Théo Verdier.
Cette action peut être un éco-geste : trier ses déchets, réduire sa consommation de viande, limiter les transports polluants… Mais elle peut aussi se transformer en « éco-projet » : engagement politique, manifestation, signature de pétitions, changement de vie professionnelle.
Selon Théo Verdier, cette étude a donc pour vocation de sensibiliser les jeunes à l’aspect collectif de l’éco-anxiété : « On peut se dire que nous ne sommes pas seuls à la vivre et surtout que nous pouvons la faire évoluer vers une action positive pour le climat », dit-il. Il s’agit d’une opportunité de “faire sa part” au sens entendu par Pierre Rabhi.