« À quand une éducation non-violente en France ? » C’est le titre de la lettre ouverte coécrite par treize professionnels de l’enfance, adressée au président de la République et publié le 10 novembre dans “L’Obs”.
Celle-ci a été rédigée dans le cadre de la Journée internationale des droits de l’enfant. Mais aussi à la suite de la publication du premier baromètre de la Fondation pour l’enfance sur les violences éducatives ordinaires (VEO), en octobre. Il révèle que 79% des parents interrogés ont confié y avoir eu recours dans la semaine qui précède l’enquête.
Définition des violences éducatives ordinaires, dites VEO
Mais que sont ces VEO ? Héloïse Junier, docteure en psychologie, psychologue spécialiste du jeune enfant et de la parentalité et formatrice, explique que, « de manière générale, on peut les définir comme des violences que les parents vont pratiquer pour asseoir leur autorité. Ça peut être physique : des claques, la fessée, tirer le bras ; verbale comme les humiliations, les menaces ; et psychologique avec l’isolement punitif ». Elle précise que « c’est vraiment le caractère de la répétition, le côté ordinaire qui va rendre ça nocif pour l’enfant. Le côté répété et intense ».
Consciente qu’il y a des débats autour de ce sujet, la spécialiste souhaite clarifier un point : « Certains polarisent et disent par exemple que moucher le nez de son enfant sans qu’il soit d’accord, c’est une VEO. Il ne faut pas non plus exagérer. Cet acte est nécessaire. Après, il y a du bon sens et c’est la façon dont on le fait. »
Les préconisations
Quels sont les conséquences de ces violences éducatives ordinaires ? Héloïse Junier explique qu’elles augmentent le risque d’anxiété de l’enfant, le stress chronique, les difficultés d’apprentissage. Cela vulnérabilise toute sa sphère. D’ailleurs, « il y a beaucoup de parents qui ont grandi avec ces VEO. Certains pensent que ça les a rendus plus fort, d’autres plus vulnérables », dit-elle. Elle constate aussi que peu sont sensibilisés. Et ceux qui le sont souhaitent qu’on leur donne des clefs. C’est pourquoi dans cette lettre ouverte, les professionnels de l’enfance ont adressé des préconisations :
- Impulser une grande campagne de communication qui parlerait des besoins et des droits de l’enfant. Mais aussi, expliquer ce que sont ces violences éducatives. Proposer des alternatives aux parents à ces violences.
- Ne plus tolérer toute incitation à la violence éducative dans l’espace public comme c’est le cas pour les violences faites aux femmes.
- Une formation pour les professionnels de l’enfance et de la santé, sur la façon dont on peut accompagner les parents. Le tout fondé sur la recherche scientifique.
- Un accès à l’information pour les familles et un soutien.
Soutenir les parents
« L’idée n’est pas de pénaliser ou d’incriminer le parent, mais plutôt d’accompagner les familles vers un mieux-être. Il n’y a pas de parents parfaits ni idéals. Il faut rappeler que le perfectionnisme est l’un des facteurs de risque du burn-out parental. Ainsi, en tant que parents, il faut avoir une auto-empathie », conclut la docteure en psychologie.
Cette lettre ouverte a recueilli à ce jour 535 signatures de professionnels, de personnalités et de sociétés savantes (dont la Société française de pédiatrie, la Société française de pédiatrie médico-légale et l’Association française de pédiatrie ambulatoire).