Toulouse, place de l’Ormeau. Vue de l’extérieur, la résidence “Vol de Nuit” n’a rien de plus ou de moins que les autres. Sur la devanture néanmoins, une plaque couleur argent attire l’œil : « Maison passive certifiée ». On pénètre dans le sous-sol et à y regarder de plus près, les murs semblent habillés. « C’est un manteau thermique en polystyrène », explique Laurence Ryckwaert, architecte à l’origine du projet. Il s’agit donc dans un bâtiment passif.
Qu’est-ce qu’un bâtiment à énergie passive ?
La résidence, composée d’une dizaine de logements partagés entre propriétaires et locataires, est configurée pour garantir un vrai confort de vie. Grâce au triple vitrage, le froid comme le chaud ne peuvent entrer dans les appartements. Ils sont bien orientés pour capter le moindre rayon de soleil en hiver. L’été, des stores épais permettent au contraire d’en limiter l’effet.
Mais le cœur du réacteur se trouve à l’intérieur des appartements, dans la buanderie. On trouve une VMC double flux. Le dispositif a l’air impressionnant avec ses gros tubes d’acier. Pourtant, cela permet de transformer l’air entrant et sortant.
« Cette machine vient tempérer l’air. Plus besoin, a priori, d’ouvrir les fenêtres. Plus besoin de grille d’aération. On extrait l’air vicié dans les pièces humides comme la salle de bain et on le transforme en air tempéré », explique Arthur Chevignard, architecte associé.
Cette méthode permet ainsi de garantir une température moyenne autour de 20 degrés. Le tout, sans utiliser le chauffage. « Nous l’allumons entre la mi-février et la mi-mars uniquement », expliquent des habitants du 2ᵉ étage. Pour eux, la facture varie entre 50 et 100 euros à l’année. « Nos amis ne nous croient pas quand nous leur disons que c’est par an et non pas par mois », s’amusent-ils.
Une réglementation trop timide pour l’instant
La construction passive repose avant tout sur un bâtiment parfaitement bien isolé, des murs au plafond en passant par les sols. Car l’essentiel des pertes de chaleur se produit au niveau des parois.
Ces habitations répondent donc à plusieurs critères : une isolation thermique renforcée, des menuiseries à triple vitrage, le traitement et la suppression de tous les ponts thermiques, une étanchéité à l’air parfaite impliquant une ventilation à double flux. Celle-ci va aussi réutiliser les calories de l’air sortant pour chauffer l’intérieur du logement.
Il existe aujourd’hui quelque 3.000 logements passifs en France. Ce chiffre est dérisoire et est largement en contraste avec les objectifs du gouvernement d’anéantir les passoires thermiques. Ces logements dans lesquels il fait bien trop froid en hiver et trop chaud en été seraient eux au nombre de 8 millions.
Mais alors pourquoi ne pas investir largement dans ces constructions ? Une question de coût ? Construire passif engendre un surcoût de l’ordre de 10% à 15%. Mais il est absorbé rapidement par les économies d’énergie. Pour les deux architectes du cabinet Ryckwaert Chevignard, la responsabilité est multiple.
Il y a d’abord un manque de volonté politique. « La règlementation actuelle, RE 2020, permet de construire des bâtiments neufs de bonne qualité en matière énergétique. Mais tant qu’elle n’ira pas plus loin, il n’y aura pas d’incitation à construire passif. C’est un vrai frein psychologique », explique Arthur Chevignard.
Le souci vient aussi du manque de formation et d’expertise de la part des entreprises du bâtiment et des promoteurs. « Nos résidences et maisons en Occitanie ont valeur d’exemple. C’est justement pour prouver que c’est possible et bénéfique quand on sait s’y prendre », souligne ce dernier.