Le 6e rapport de synthèse du Groupement International des Experts du Climat (Giec) est sorti en mars dernier. Cette méta-analyse fait le résumé des cinq rapports précédents portant sur les trois groupes de travail qui composent cette entité indépendante. Il résume ainsi les connaissances sur le changement climatique, ses impacts, ses risques et suggère aussi des moyens de l’atténuer et de s’y adapter.
Pour tout comprendre et surtout en tirer les enseignements les plus positifs, nous avons contacté Anatole Chouard. Il est le créateur de la chaîne YouTube Chez Anatole, sur laquelle il fait de la vulgarisation scientifique. Sa vidéo sur le dernier rapport du Giec a déjà cumulé quelque 20 000 vues.
AirZen Radio. Qu’est-ce que le Giec ?
Anatole. C’est un groupe de chercheurs. Mais ils ne vont pas faire de la nouvelle recherche sur le climat. Ils vont synthétiser les recherches déjà existantes, des articles scientifiques revus par les pairs. Le groupe 1 par exemple, qui étudie la base scientifique du réchauffement climatique, a synthétisé 14 000 études en un rapport.
Dans ce 6e rapport, on souligne une nouvelle fois avec insistance l’impact de l’activité humaine sur le changement climatique, n’est-ce pas ?
Oui. « Il est sans équivoque que l’influence humaine a réchauffé l’atmosphère, les océans et les terres », voilà ce qu’on peut y lire. Cela paraît évident, mais il faut le marteler car, selon un récent sondage du World Economic Forum, il y a encore ans le monde une personne sur trois qui le remet en doute.
Par ailleurs, le Giec démontre à nouveau la différence entre les variations naturelles du climat, comme les cycles solaires par exemple, depuis le début du XXe siècle. Et il note que l’impact de l’activité humaine est quasi à 100% responsable du réchauffement. Sur les 1,1 degré de hausse des températures depuis un siècle, l’activité de l’homme est quasi exclusivement la fautive.
A-t-on fait des progrès pour tenter de limiter le réchauffement ?
S’il y a un message à retenir : est-ce qu’il y a de l’action ? Oui. Est-ce suffisant ? Non ! Et cela, dans tous les secteurs. Et il y a une urgence à ce que ces actions s’accélèrent car, dès à présent, ce sont près de 3,5 milliards d’êtres humains qui vivent dans des contextes hautement vulnérables au dérèglement climatique. Le Giec mesure l’impact de l’adaptation de nos systèmes de santé, l’adaptation de notre économie aux catastrophes naturelles notamment et il y a beaucoup de progrès à faire pour tenter de « vivre avec ».
Il y a aussi des actions concrètes, rapides, efficaces qui pourraient déjà avoir des bénéfices, notamment sur notre santé…
Oui, la réduction des émissions de CO2 aurait un impact quasi immédiat. Et ce, sur la prochaine décennie, sur la qualité de notre air par exemple. Idem pour la gestion de l’eau. Et c’est ce qui ressort du travail du groupe 3 qui se penche sur les solutions. C’est aussi la première fois qu’un rapport du Giec parle autant de la santé mental. Et de l’impact du réchauffement sur nos consciences. Y remédier peut contribuer aussi à aider les gens vivre mieux.
Que peut-on faire pour passer à l’action ?
« D’ici 2050, il faudrait diminuer l’utilisation du charbon de 95%, du pétrole de 60% et du gaz de 45% » ! Voilà ce que l’on peut lire. Il ne s’agit pas de recommandations politiques. Par ailleurs, le Giec, en résumant des milliers d’études, a démontré ce que ces baisses drastiques pourraient produire des conséquences. Aussi, l’objectif est, je le rappelle, de tenter de ne pas franchir la limite des +2 degrés de réchauffement imposée par les Accords de Paris. Charge ensuite aux gouvernements du monde de s’en emparer.
C’est absolument titanesque, 84% de l’énergie qu’on consomme dans le monde est fossile. Mais ce qu’il faut se dire, c’est que chaque degré compte ! Et toute action de diminution, de sobriété, est bonne à prendre. Il faut donc agir. Les experts nous disent que les décisions ou non-décisions prises au cours de cette décennie auront un impact irrémédiable sur le siècle à venir.