« J’ai une rage. J’ai envie de tout péter. Je suis très motivée ! » À l’approche des mondiaux de para-athlétisme, qui se tiendront du 8 au 17 juillet à Paris au Stade Charléty, Célia Terki a la niaque. À 22 ans, l’athlète handisport de haut niveau n’a qu’une hâte : être sur la piste pour porter les couleurs tricolores. Atteinte d’une déficience visuelle, celle qui fait partie du club US Talence, en Gironde, a été sélectionnée en équipe de France handisport en 2018. Ses spécialités sont le 200 m et le 400 m.
C’est à 9 ans qu’on lui diagnostique une dégénérescence maculaire, une maladie qui lui fait perdre la vue progressivement. Au même moment, elle se découvre une passion pour l’athlétisme et plus précisément la course. « C’est mon prof de sport qui m’a proposé de faire un cross avec lui. J’avais quand même peur de courir toute seule, mais j’ai kiffé, dit-elle en souriant. Il me fallait un sport qui me mette K.O, dans lequel je puisse montrer que je peux faire des choses. »
Depuis, la jeune sportive a parcouru du chemin et a pu montrer qu’elle en avait sous le pied. Aujourd’hui, elle est classée 10ᵉ mondial sur 400 m et 6ᵉ mondial sur 200 m. Elle est notamment vice-championne de France du 200 m. Elle a aussi remporté les grands prix de Dubaï et de Suisse en 400 m. Mais ces résultats ne sont pas arrivés sans efforts. « J’ai particulièrement souffert cette saison. J’ai donné le meilleur de moi-même. Avec mon entraîneur, on a travaillé plus que d’habitude. Une semaine type, c’est deux heures d’entrainement le matin et l’après-midi, du lundi au samedi, peu importe le temps. Le dimanche, c’est repos ou compétition », explique-t-elle.
Des séances adaptées
Pour l’entraîner et l’accompagner dans sa réussite, elle peut compter sur Wilfried Krantz, ancien décathlonien. Il est référant national des sauts à la Fédération française handisport. Il est aussi le manager de « LA TEAM WIL », un groupe d’entrainement qui a la particularité de réunir aussi bien des athlètes de haut niveau en situation de handicap que des valides. Célia Terki s’y entraîne. Cette mixité lui plait. « Je trouve que c’est une force pour nous. On s’apporte mutuellement, confie-t-elle. Et puis, Wil s’adapte à mon handicap. Mes compagnons sont aussi vigilants donc ça m’aide beaucoup aussi. »
Par ailleurs, ses séances, la jeune athlète ne les fait pas sans sa paire de lunettes de soleil, car elle est sensible à la lumière. « Moi, j’ai une vision périphérique, et j’ai une tâche au centre de l’œil. C’est un trou au niveau de ma rétine qui s’émiette parce qu’elle est trop vieille. Quand je cours, il ne faut pas qu’il y ait des choses devant moi. Je peux aussi changer de couloir quand je vois des lignes qui se croisent. Après, c’est aussi à moi de m’adapter à la lumière du jour. Je peux aussi avoir des fatigues visuelles ».
Atteindre ses objectifs
Consciente que sa maladie progresse, Célia Terki envisage les options comme celle de courir avec un guide. Elle ne s’en cache pas, elle y pense au quotidien et en a peur. « Mais grâce à l’athlétisme, j’arrive à l’accepter parce que je me dis que je fais quelque chose de ma vie et il y a pire. Il faut avancer, il y aura toujours des adaptations. Ce n’est pas à cause de ça que je vais arrêter. » D’ailleurs, afin de se consacrer à ses mondiaux d’athlétisme et aux Jeux olympiques de Paris 2024, elle a mis sur pause son BTS Management commercial opérationnel.
Malgré ses contraintes du quotidien, sa récente blessure à l’ischio, elle ne dévie pas de ses objectifs de médailles. Certainement parce qu’elle garde en mémoire les moqueries dues à son handicap. « On m’a dit quand j’étais jeune qu’à cause de cette maladie je ne pourrai rien faire de ma vie, raconte-t-elle. Aujourd’hui, je suis très fière, car je représente mon pays, j’aime mon sport. Il me permet d’accepter mon handicap, de m’accepter en tant que femme, de pouvoir me ressourcer quand j’étais en deuil après le décès de mon père. » Une envie de dépassement de soi et un discours plein de résilience aussi encouragé par son entourage bienveillant.
Alors, elle enjoint tout le monde à croire en soi : « Même si on vous dit que vous ne servez à rien, continuez à vous battre parce que vous êtes la seule personne qui pourra faire les choses. Certes, la vie est compliquée, mais il y a toujours des solutions. »
À savoir, le fonds de dotation Génération Avant-Garde accompagne financièrement les athlètes de la “Team Will”.