Le réchauffement climatique accélère et décuples les épisodes de fortes chaleurs, les canicules et les risques de sécheresse et d’incendies. Il est donc important, au-delà de l’adoption d’un mode de vie plus durable, d’opter pour les bons gestes afin de faire baisser la température de son corps, de se protéger des fumées nocives et donc de préserver sa santé.
Dr Le Guillou est pneumologue dans le département du Var et président de l’association Santé respiratoire France.
AirZen Radio. Que se passe-t-il dans notre corps pendant les épisodes de canicule ?
Dr Le Guillou. On a un système de régulation de la température interne, situé à la base de notre cerveau. C’est l’hypothalamus. Il régule la température de notre corps pour qu’elle soit aux alentours de 37 degrés. Dès que la température extérieure est supérieure à 32 voire 35 degrés, pendant les périodes de canicule, on a des mécanismes naturels qui se mettent en place. C’est le cas de la sudation par exemple.
Quand il y a des chaleurs extrêmes, au-delà de 38 degrés, c’est là que notre corps peut nous jouer des tours ?
Tout à fait. Les systèmes mentionnés précédemment peuvent être dépassés. La sudation n’est, par exemple, pas très efficace au-delà de 35 degrés. Dans ces cas-là, il peut même y avoir un impact négatif de la chaleur corporelle sur notre chaleur interne. Cela peut aller jusqu’à la destruction de cellules et l’impact sur notre santé est alors définitif.
Quel est l’impact sur notre santé quand ces épisodes durent longtemps ?
Il y a des phénomènes d’adaptation, notre corps réagit. Il va privilégier certaines zones du corps à garder tempérées : les vaisseaux, par exemple, car ils irriguent le cerveau, la peau aussi. Il est donc primordial de réduire la température autour de nous en restant au frais le plus possible.
Les canicules peuvent-elles aggraver les pathologies existantes ?
Oui, des maladies respiratoires comme la bronchite chronique et l’asthme ou encore des pathologies cardiovasculaires. Pourquoi ? Eh bien, parce que le mécanisme reste toujours le même : la déshydratation. À partir de là, elle peut être responsable d’une décompensation au niveau respiratoire.
Pour ce qui est des allergies, la chaleur ne les empêche pas. D’autant que s’il y a une sécheresse au niveau respiratoire, à ce moment-là, il y a une petite brèche sur la muqueuse et les allergènes peuvent pénétrer plus facilement. Par ailleurs, en cas de pic de chaleur, en particulier s’il n’y a pas de vent, on a une pollution à l’ozone qui, elle aussi, est toxique pour les voies respiratoires.
Comment rafraichir la température de son corps ?
Il faut bien s’hydrater, boire de l’eau principalement et en continu, tout au long de la journée, même si on n’a pas soif. Il est possible de doubler sa consommation quotidienne en allant jusqu’à 3 litres par exemple. On évite les boissons alcoolisées, sucrées ou les glaces qui appellent la soif. On peut aussi boire du café ou du thé froids, du moment qu’il n’y a pas de sucres ajoutés.
Autre élément : on peut prendre une douche froide de temps en temps, utiliser un ventilateur ou une climatisation avec parcimonie. Attention à ces moyens qui peuvent entraîner parfois une sécheresse au niveau des muqueuses.
Et les activités physiques alors ? Compliqué pour les sportifs de se priver de sport pendant plusieurs jours !
Même en période de canicule, on peut faire du sport. Mais à ce moment-là, on doit le faire très tôt le matin, aux heures les plus fraîches entre 5 et 7 heures, et avec une intensité modérée. Pourquoi ? L’activité physique augmente la température corporelle et cela peut être dangereux et nous amener très vite aux coups de chaleur. On peut aussi faire une activité physique dans une pièce climatisée ou favoriser les activités aquatiques, comme la natation.
En Gironde, dans le Sud-Est et même dans les Hauts-de-France, les feux de forêt ont été nombreux en juillet. Dans quelle mesure les fumées peuvent être nocives pour nous ?
À partir du moment où on inhale de la fumée ou de la poussière, cela peut constituer un danger pour notre système respiratoire. Il y a deux types de fumées dans les incendies : les fumées noires d’abord. Ces fumées-là contiennent du cyanure, du benzène, du monoxyde de carbone. Et puis, il y a les fumées blanches qui contiennent des particules fines pouvant être nuisibles pour la santé mais pas de la même façon. Les premières causent des asphyxies, les secondes des irritations.
Que faire alors si, sans parler des procédures d’évacuation, on vit à côté d’une zone qui a brûlé ?
L’idéal est d’essayer d’éviter que les fumées rentrent à l’intérieur du domicile ou du lieu de travail. On garde donc les fenêtres fermées. Si on a les premiers signes d’irritation – les yeux qui piquent, la gorge qui gratte ou de la toux –, on peut se frotter avec de l’eau fraîche et limiter au maximum l’exposition.
À partir de quel moment doit-on s’inquiéter ?
Aux premiers signes d’irritation, en appliquant ces gestes et en limitant l’exposition, cela va passer. Par contre, si on commence à ressentir des étourdissements ou des nausées, c’est signe que les fumées sont plus toxiques et contiennent du monoxyde de carbone qui peut être très nocif. Il faut donc quitter les lieux le plus rapidement possible.
Et le masque chirurgical, est-il utile dans la rue ?
Tout à fait, et on commence à bien le connaître depuis la pandémie. Il filtre un certain nombre de particules issues des fumées noires ou blanches, cela permet de limiter l’irritation ou l’intoxication. On peut donc le porter en sortant de chez soi.