Anita Fatis se fixe deux heures de marche par jour l’automne prochain sur l’Everest. Depuis cette année, elle est équipée d’un matériel spécial qui l’a aidée à se remettre debout, malgré la sclérose en plaques, dont elle est atteinte depuis 32 ans et qui l’a clouée dans un fauteuil pendant 17 ans.
Un handicap, une maladie, qui, elle le dit elle-même, lui ont permis de se surpasser, de se mettre à la natation, d’acquérir un très bon niveau, d’intégrer l’équipe de France et de participer aux jeux paralympiques de Londres et de Rio. “J’ai été sept fois médaillée sur différents championnats du monde et d’Europe et 15 fois championne de France”, cite-t-elle fièrement.
La maladie progresse plus lentement
En 2016, elle met un terme à sa carrière. Et maintenant ? “J’ai toujours adoré la montagne. Quand j’étais valide, on a fait des petits sommets en France avec mon mari. Et l’Everest me faisait rêver.” C’est ainsi qu’en 2018, elle se lance et grimpe à 5 200 mètres. L’année suivante, rebelote. Elle bat son précédent record et monte jusqu’à 5 650 mètres. D’autant plus que le sport est primordial pour lutter contre la maladie : “Quand on a une sclérose en plaques, il faut bouger. La maladie progresse plus lentement.”
Deux premières ascensions qu’elle a donc réalisées en fauteuil, portée par les Népalais qui s’occupaient de tout : “Il faut accepter d’être aidée”. Sauf au moment de la descente, où elle était autonome en quadrix, un VTT quatre roues.
Inspirée par un grimpeur du Kilimandjaro aidé d’un exosquelette, elle découvre Ottoboc. Après des tests et entraînements, elle pourra marcher quotidiennement avec son équipement au Népal, en novembre prochain. Il y aura encore un fauteuil, car Anita ne peut pas se permettre de tout faire sur ses jambes, mais elle se fixe deux heures de marche quotidiennes.
“Ça fonctionne tellement bien ! Je mets beaucoup de publications sur les réseaux parce qu’il faut que ça soit accessible à tout le monde, à toutes les personnes qui sont comme moi. Ça existe, les gens peuvent se remettre debout. Il faut alerter les pouvoirs publics pour financer cet appareillage”, explique-t-elle. Appareillage encore coûteux, qui nécessite souvent des recherches de partenaires ou encore l’organisation de cagnottes en ligne.
Anita Fatis s’entraîne sérieusement, comme la sportive de haut niveau qu’elle est. Pas mal de marche. Beaucoup de natation, qui muscle le dos et les bras. “Je vais nager en hypoxie, en prenant le moins d’inspirations possible. Une technique pour se préparer au manque d’oxygène en montagne, travailler sa capacité pulmonaire. Je n’ai pas l’occasion de m’entraîner en montagne, alors je trouve d’autres solutions. En tout cas, ça a bien fonctionné pour les deux premiers treks.”
Chaque ascension est une victoire
Anita Fatis ne sera pas seule sur l’Everest. “Puisque j’ai fait du sport de haut niveau, les gens pensent que je suis la seule à pouvoir faire ça, mais je vais emmener, comme la dernière fois, une personne qui n’a pas eu mon parcours sportif.” Elle sera accompagnée d’une jeune femme atteinte d’une forme rémittente de la sclérose en plaques.
“À chaque fois, c’est un moment très émouvant. Quand j’arrive en haut, je me dis c’est encore une victoire”, s’extasie Anita, qui salue au passage la gentillesse et le courage des Népalais, sans qui rien n’aurait été possible. “Quand je reviens, il me faut toujours un mois pour m’en remettre. C’est une expérience extraordinaire. Mon handicap m’a permis d’atteindre ces niveaux-là. Sans la maladie, je n’aurais jamais fait de sport à haut niveau comme ça. C’est une question de motivation. Pour avancer, il faut se lancer des projets. C’est possible. Bien sûr que c’est possible. J’ai vu des gens qui n’étaient pas beaucoup sportifs monter, lentement, mais ils réussissaient à monter. Ce qui est important, c’est d’arriver au but.”
Une expérience bouleversante à tous les niveaux, et aussi par la beauté saisissante des paysages. “Je n’ai pas de mots pour expliquer comme c’est beau.”